La Mégère (Lasiommata megera) et le Satyre, un papillon unique
La Mégère et le Satyre… Avouez que c’est un drôle de nom pour un papillon, non ? On imaginerait plutôt une vieille sorcière avec un nez crochu qu’un insecte aux ailes orange pétard !
Et pourtant, derrière ce nom un peu rude se cache l’un des papillons les plus charmants et communs de nos jardins : Lasiommata megera, aussi connu, chez ces messieurs, sous le doux sobriquet de Satyre. Oui, la Mégère a un copain, et lui aussi porte un nom haut en couleur.
Allez, on va découvrir leur petite vie de papillons pas si mégères que ça !
Qui sont la Mégère et le Satyre ?
Chez la Mégère, Monsieur et Madame portent des noms différents, ce qui est plutôt rare chez les papillons.
- Monsieur, c’est le Satyre.
- Madame, c’est la Mégère.
Mais d’où viennent ces noms ?
- Lasiommata, leur nom latin, vient du grec lasio (velu) et ommata (yeux). Oui, ces papillons ont des yeux poilus, enfin… surtout des écailles velues autour de leurs yeux composés.
- Quant à megera, c’est le nom d’une des Furies de la mythologie grecque, déesse de la haine et de la vengeance. Sympa l’ambiance…
En réalité, cette histoire de noms est un joli bazar scientifique. Pendant longtemps, certains spécialistes voulaient tout appeler « Satyre », mais le nom avait déjà été attribué à un autre papillon. C’est Gérard C. Luquet, entomologiste français, qui a tranché en 1986 : on garde « Mégère » pour la femelle et « Satyre » pour le mâle.
👉 Si vous voulez plonger dans ces batailles de noms, lisez cet article hyper détaillé sur la zoonymie de la Mégère et du Satyre.
Mais entre nous, pour la suite, on va simplifier : on l’appelle la Mégère.

Comment reconnaître la Mégère et le Satyre ?
La Mégère fait partie de l’ordre des Lépidoptères, de la grande famille des Nymphalidés (Nymphalidae), et plus précisément de la sous-famille des Satyrinae.
- Taille : c’est un papillon de taille moyenne, avec une envergure entre 4 et 5 cm.
- Couleur : ses ailes sont orange vif, décorées de dessins noirs. Sur les ailes antérieures (en haut), on repère un gros ocelle (un « œil »), et sur chaque aile postérieure (en bas), quatre ocelles plus petits, dont deux assez discrets. Ces ocelles présentent généralement un petit point blanc en leur centre.
- Ailes fermées : les tons deviennent bruns, avec des ocelles plus discrets, presque camouflés.
🦋 Ses particularités :
- Le mâle se distingue par une bande marron foncé traversant chaque aile, à peu près au centre.
- Ses couleurs sont plus marquées que celles de la femelle.
- Et petite surprise : la femelle est souvent un peu plus grande que le mâle !

Comment vit elle ?
La Mégère vole de mars-avril jusqu’en octobre, selon les régions. Elle peut avoir deux à trois générations par an.
Ses habitats favoris
- Friches fleuries
- Talus routiers
- Prairies sèches
- Bords de chemins
- Terrains vagues et rocailleux
- Jardins pas trop entretenus (un gazon trop ras, c’est non !)
Elle apprécie particulièrement les endroits bien ensoleillés, où elle peut se chauffer sur une pierre, un muret ou un chemin de terre.
La Mégère est dite héliophile : elle adore prendre des bains de soleil.
En France, elle est présente quasiment partout sauf dans les zones vraiment froides de haute montagne. Elle est même une habituée du littoral méditerranéen où elle trouve des milieux secs et chauds.
Le calendrier de la Mégère : papillon de longue saison
La Mégère est visible de mars ou avril jusqu’à octobre, selon la météo et les régions. Elle peut avoir 2 à 3 générations par an :
- 1re génération : émerge au printemps.
- 2e génération : visible en été.
- Parfois une 3e génération apparaît à l’automne dans les zones les plus chaudes.
Pendant les étés caniculaires, elle peut parfois marquer une pause estivale, ce qu’on appelle l’estivation, pour reprendre son activité à la fin de la saison chaude.
Que mange la Mégère et comment mange t’elle ?
Comme tous les papillons, la Mégère se nourrit du nectar des fleurs.
Elle utilise pour cela un outil très spécial : une longue trompe souple appelée spiritrompe.
La trompe du papillon
👉 Qu’est-ce que c’est, cette fameuse trompe ?
- C’est en réalité une sorte de petit tuyau très fin.
- Au repos, elle est enroulée en spirale sous la tête du papillon, un peu comme un tuyau d’arrosage miniature.
- Quand la Mégère veut boire, elle déroule sa trompe et la plonge au fond des fleurs, là où se cache le nectar sucré.
Grâce à cette trompe, la Mégère peut atteindre même les nectars situés très profondément dans les corolles des fleurs, là où d’autres insectes ne peuvent pas aller. C’est un peu comme si elle avait une paille extensible toujours sur elle !
En butinant, elle transporte aussi du pollen d’une fleur à l’autre. Ce faisant, elle participe à la pollinisation, un rôle essentiel pour la reproduction des plantes et la biodiversité.
Ses plantes préférées
Pissenlit, Achillée millefeuille, Trèfle, Marjolaine, Origan, Scabieuse, Chardon, Bruyère mais aussi la Valériane ou la Lavande.

Comment se reproduit elle ?
La reproduction de la Mégère est un modèle de discrétion et d’efficacité.
- La femelle pond ses œufs isolément, un par un, sur des graminées sauvages.
- Ses plantes favorites :
- Pâturin annuel (Poa annua)
- Dactyle (Dactylis glomerata)
- Fétuques (Festuca spp.)
- Brome (Bromus spp.)
Elle choisit ce qu’elle trouve sur place, preuve de son adaptabilité.
Dans les jardins où l’herbe n’est pas tondue trop ras, on peut donc tout à fait accueillir la Mégère !
Les chenilles
- Couleur : vert tendre, rayées plus ou moins de blanc ou de jaune.
- Taille : jusqu’à 2,5 cm.
- Elles possèdent une petite queue bifide.
- Leur couleur verte est un camouflage parfait dans les herbes.
Elles se nourrissent exclusivement des feuilles de ces graminées avant de se transformer en chrysalide.
La chrysalide, d’un vert jaunâtre, est fixée sur une herbe ou une tige et passe totalement inaperçue. Magie de la nature !
La Mégère est-elle en danger ?
Malheureusement, oui. La Mégère, comme beaucoup d’autres papillons (la Petite Tortue, le Machaon, le Papillon Citron ) , subit un net déclin ces dernières décennies.
Les menaces
- Disparition des prairies naturelles remplacées par des cultures intensives.
- Tonte trop fréquente des bords de routes et des talus.
- Pesticides et herbicides qui détruisent les plantes nourricières et contaminent les papillons.
- Changements climatiques : sécheresse, pluies torrentielles, gel tardif…
La Mégère n’est pas encore strictement protégée, mais elle fait partie de ces espèces qu’il faut surveiller de près.
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Réf : Le Monde des Insectes / Inpn /
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